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Si une image vaut mille mots

La médiathèque de la Trinité, ce lieu où mes inspirations ont commencé, petite, m’a proposé d’exposer mes photos en juin 2017. C’est un endroit particulier de mon enfance alors je voulais réaliser une exposition spéciale pour ce lieu. J’avais une seule contrainte (et c’est toujours mieux d’en avoir !) : faire une exposition en lien avec les livres.

Alors, les livres… Difficile ! Si je les dévorais enfants, ils sont partis de mon quotidien à la fin de mon adolescence. J’avais mes livres d’études, oui, mais j’avais perdu le plaisir de lire. Lire était la contrainte du temps. J’étudiais et je commençais à travailler dans la communication digitale, dans le monde de l’instant, des « insta », de l’instantané, de l’instinctif. La communication aujourd’hui c’est cela, ou du moins celle que j’ai côtoyé : rapide, efficace, claire. Pas de fioriture, pas de perte de temps : l’information directe. Peu de mots mais de l’image. Tout cela tombait bien : je pouvais développer ma pratique de la photographie – à défaut de l’avoir étudiée dans une école – mais aussi de l’image en général avec la vidéo et le graphisme. Bref, une période riche en création visuelle, mais pauvre culturellement et artistiquement…

Les livres, je les avais oubliés.

Donc, me voilà avec un dilemme : exposer sur le thème des livres. Je me serais sentie un peu hypocrite de faire une ode à la lecture sans avoir touché un recueil depuis des années.

 

Détourner le problème en utilisant le problème lui-même. Exposer à l’aide des livres.

Dans ce monde de communication, qui est en fait plus clairement le monde dans lequel nous vivons car nous sommes quotidiennement confrontés à la communication de tous les côtés, nous sommes beaucoup à ne plus prendre le temps de lire. Mêmes hors des livres et du plaisir de la lecture. En ce qui concerne l’information, nous nous informons en un clin d’œil. Nous privilégions l’image, la vidéo s’il y en a, sinon une photo accompagnée d’un simple titre nous suffit, un tweet en quelques caractères. Simple, efficace, oui : l’essentiel. Nous ne cherchons pas forcément plus loin.

Et voilà quelque chose qui me déplaisait : l’expansion des « fake news ». Une manipulation visuelle simple : un titre provocateur, une photo sortie de nulle part qui pourrait appuyer l’information faisant office de preuve. Et les mensonges rentrent dans la tête comme des vérités. Et les émotions s’emportent. Et la haine apparaît.

C’est dans cette optique de montrer la facilité de la manipulation visuelle que j’ai imaginé mon exposition à la médiathèque. Plutôt que de partir sur une dénonciation négative qui ne m’aurait pas ressemblé, j’ai voulu faire quelque chose de ludique et positif, étayer mon propos par quelque chose de beau : les livres, mais surtout la poésie.

J’ai sélectionné une vingtaine de photos qui faisaient partie de mes préférées. Je n’ai pas cherché à ce qu’elles aient un lien entre elles, le seul facteur décisif étaient qu’elles me touchent, esthétiquement ou par le souvenir qu’elles me procuraient. Je suis en suite allée dans les couloirs de la médiathèque où j’ai ouvert des livres au hasard, au petit bonheur (c’est le nom de l’exposition). Des livres qui m’attiraient, par leur titre ou leur auteur. Quand une page me plaisait et pouvait correspondre à une des images choisies, je la gardais pour l’exposition.

Les photos ont été ensuite présentées en diptyque, accompagnée du texte choisi. Elles n’étaient pas nommées car le texte faisait office de titre. Je voulais montrer qu’un texte et une photo mis côte à côte sans lien à la base pouvaient totalement faire sens. Comme les fausses nouvelles que nous voyons défiler sur nos fils d’actualité et qui nous semblent véridiques grâce à l’image.

Les textes volaient à côté des photographies. Un contraste avec ces mots écrits et fixés dans des livres et les instants volés des photos exposées. La salle d’exposition était habillée de guirlandes guinguettes et accompagnée de vieilles musiques aux sons d’accordéons. J’avais l’impression, en entrant dans la médiathèque, d’entrer dans mes souvenirs d’enfance.

 

 

  

 

 

  

Je tiens à remercier toute l’équipe de la médiathèque pour m’avoir aidé à réaliser cette exposition comme je l’imaginais, au niveau matériel et aussi personnel. Ainsi qu’aux comédiens les Eclaireurs qui ont créé un spectacle juste pour cette exposition. C’était un rêve qui se réalisait, sans même avoir conscience de l’avoir rêvé !

 

 

 

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